Ethnologie familiale

« Pourquoi une mère reste-t-elle de marbre, sans émotion, en silence, lorsque ses deux filles âgées de 9 et 11 ans lui disent que leur beau-père les viole depuis des années? »

Parce que leur mère a vécu la même chose. Les parents abuseurs directs ou indirects, ceux qui laissent abuser leurs enfants par un autre membre de la famille, ont été abusés sexuellement dans leur enfance par un adulte en charge de les protéger. Devenus adultes, pour ne pas souffrir, faire l’économie de leurs émotions, chagrin, colère, rage, peur, ils projettent sur les enfants la victime qu’ils ont été, et lui font vivre la même chose qu’eux. De la sorte ils évacuent, mettent dehors, la victime en eux, la font disparaître, en apparence, car l’enfant souffrant est toujours là à l’intérieur, et les pathologies se développent. Comme ça ils récupèrent leur puissance, sur leurs enfants, dans le pouvoir de leur nuire. Car l’inceste est une réduction à l’impuissance quasi totale. Etant donné le niveau de souffrance des parents, à aucun moment ils ne renonceront à cette stratégie d’évitement. (Un oncle qui viole ses nièces fait partie des cas d’inceste.)

Cela me fait penser au théâtre pornographique à Rome sous Néron décrit dans « Néropolis » de Montheilet offert par ma mère lorsque j’avais 25 ans. Le théâtre pornographique qu’est-ce que c’est ? C’est par exemple une esclave condamnée à mort est enduite des sécrétions d’une ânesse durant plusieurs semaines jusqu’à la représentation durant laquelle un âne, excité par l’odeur, viole et tue l’esclave. C’est une mise en scène de l’inceste : l’animal, avec son sexe démesuré pénètre et tue une femme. Deux espèces différentes sont en présence : comme le père et sa fille appartiennent à deux générations différentes. Distance de l’espèce dans un cas, distance générationnelle dans l’autre.Dans l’inceste c’est bien la partie animale de l’homme, son sexe, qui gouverne. Le sexe d’un père dans le corps de son enfant est toujours trop gros, il est démesuré, gigantesque comme le sexe de l’âne. Le sentiment d’horreur ressenti est le même, dans le cas de l’enfant et dans le cas de la mise en scène pornographique. L’inceste tue, comme le coït avec l’âne tue, à cette différence près : dans l’inceste il reste l’enveloppe corporelle avec ses fonctions physiologiques, l’être a été anéanti, le mental ne peut plus penser, le cœur est brisé, le sexe écrasé. Il ne reste que les fonctions vitales. Le cinéma pornographique présent sur le web à haute dose, met en scène la même chose l’inceste : un homme doté d’un sexe énorme, souvent noir, car les noirs sont réputés avoir un sexe particulièrement long, ce qui est une légende, pénètre une femme blanche entièrement épilée. Son sexe est épilé, il ressemble ainsi à un sexe d’enfant, en plus gros, vu à la loupe. La scène se résume à une femme dont le sexe prend l’apparence de celui d’une enfant prépubère, pénétré par un sexe gigantesque

Les conséquences :

L’inceste affecte la sexualité et la créativité. L’énergie créative s’abreuve à la même source que l’énergie sexuelle. L’inceste coupe le flux vital, l’énergie vitale et sexuelle. La vie sexuelle d’un enfant incestué devenu adulte est quasi inexistante, et sa créativité mise à mal. Le père violeur lui a volé son plaisir, son désir, sa jouissance. Il lui a écrasé le sexe ainsi que l’énergie qui va avec. Il l’a réduite à l’état d’objet. C’est cette réduction d’un être vivant, désirant, créateur : l’enfant, à un objet soumis aux pulsions incontrôlées, de ceux-là mêmes qui ont pour devoir de le protéger, qui est le processus de déshumanisation que nous voyons à l’œuvre dans le monde. Les deux conditions sont nécessaires pour qu’il y ait déshumanisation :

-un enfant soumis à des pulsions sexuelles de la part d’adultes qui le haïssent (très délicat, et libérateur, d’accepter de voir que nos parents ne nous ont pas aimés, avec tout l’amour que nous leur avons donné !!)

-un adulte doté de fonctions protectrices

Nos parents non aimés par leurs propres parents prédateurs, ne nous aiment pas, et veulent nous faire payer ce que leurs parents leur ont fait. Les abus, transmis de génération en génération, génèrent la haine et coupe du flux vital, de l’amour. C’est donc la haine qui circule dans les familles, sous couvert d’amour, bien sûr: « c’est pour ton bien, c’est parce que je t’aime » dise les parents incestueux, créant un blocage de la pensée chez la petite victime.

La question de la puissance 

Les femmes sont très puissantes, plus puissantes que les hommes. On n’enferme et on n’asservit que les forts, pour les réduire à l’impuissance. Les enfants, sont réduits à l’impuissance par leurs parents. Les filles plus que les garçons, car la société bride dès l’enfance la vitalité et la puissance des futures femmes. Les femmes ont la puissance biologique, la puissance physique, c’est juste une question d’entraînement. Les femmes sont éduquées, conditionnées à se vivre comme des êtres faibles. Là où la puissance des femmes est supérieure, c’est dans la sexualité. La capacité de jouissance des femmes est illimitée. Le nombre de rapports sexuels quotidiens possibles pour une femme est bien supérieur aux possibilités d’un homme même au faîte de sa maturité sexuelle. La femme n’est pas fatiguée après un rapport sexuel satisfaisant, elle est redynamisée, rechargée énergétiquement. L’homme s’endort. Les hommes se sont vite aperçus des vécus différents selon les sexes et de leur infériorité. Il leur restait la prééminence relative de leur force physique, qui est toute culturelle comme le mentionne Françoise Héritier. La puissance biologique et sexuelle est nettement plus attractive que la puissance physique. Elle fait l’objet de convoitises. Il n’y a jamais eu de pénis neid. La réalité est : le désir d’enfanter de l’homme qui convoite le corps de la femme, qui l’envie de par tous ses potentiels de jouissance, donner naissance, allaiter, jouissance sexuelle.

La femme peut initier l’homme à avoir des rapports sexuels plus longs et plus satisfaisants pour les deux partenaires. C’est la femme qui est initiatrice, sa jouissance met plus de temps à se libérer que celle de l’homme, et dans le même temps elle peut jouir de multiples fois, elle est multi orgasmique. L’acceptation que la femme est l’initiatrice et la prêtresse, permet la création d’une relation harmonieuse entre l’homme et la femme. C’est la voie du TAO et du TANTRA, à l’inverse de la pornographie. C’est cette capacité, de rapports sexuels et de jouissance quasi illimitée (qui a été reprise, utilisée tout en étant réduite au coït dans la prostitution. Aucun homme ne pourrait faire ce travail, et avoir des dizaines d’érections par jour. On voit bien là que la prostitution est un dévoiement de la puissance du jouir des femmes au service de l’homme, le proxénète, qui en tire, lui la jouissance de l’argent. Il se remplit les bourses de la puissance sexuelle qu’il vole aux femmes.) Les guerres auxquelles nous assistons ne sont que des guerres des sexes, où les hommes volent la puissance sexuelle des femmes. Comme rien n’est simple: ce sont les femmes qui élèvent les hommes. Elles sont les gardiennes du patriarcat et de la tradition. Il n’est pas question que leur fille ait une meilleure existence qu’elle.

Les sociétés dirigées par les hommes commencent d’abord par :

-interdire la connaissance dès le plus jeune âge aux filles

Que ce soit les sociétés traditionnelles musulmanes, juives, catholiques, qui voilent les femmes, leur imposent le port des perruques, leur interdisent la connaissance (les études, l’école), et cela dès l’enfance pour un conditionnement parfaitement efficace.

-interdire la jouissance à la puberté

C’est là qu’intervient la culture du viol, des mariages précoces dès l’âge de 9 ans, dont l’objectif intentionnel, est de détruire la puissance sexuelle de la femme et de la réduire à l’état d’objet privé de jouissance. Tout cela bien sûr avec la bénédiction des mères. Dans le viol, seul l’homme jouit, en l’occurrence, de détruire. Car la connaissance, la capacité de jouir, à avoir du plaisir : c’est la liberté.

Au Moyen-âge, à la fin du 15°s, nous dit Sylvia Federici dans Caliban et la sorcière les femmes avaient acquis un certain nombre de liberté, notamment de vivre ensemble dans des communautés laïques de femmes, comme les béguinages dans le Flandres. C’est à cette époque que la chasse aux sorcières démarre, afin de transposer la lutte de classes entre le pouvoir régnant, aristocratie, bourgeoisie, montante, clergé, et le prolétariat, à la lutte entre les sexes au sein des familles, des villages. C’est à cette époque que le viol en bande est toléré avec pour conséquence que la femme violée, ne peut plus se marier. Il ne lui reste plus qu’à aller pointer au bordel. Les bordels municipaux sont en effet ouverts à cette même période, le gibier pour l’alimenter ayant été créé. Le pouvoir représenté par l’état, met en place dès cette époque des stratégies clairement définies d’asservissement et de réduction de la femme à l’impuissance. Car la femme a le contrôle des naissances, elle peut choisir de ne pas avoir d’enfant. Elle a le pouvoir s’abstenir de donner des corps à l’état. Et ça l’état ne peut l’accepter. Il lui fait le contrôle absolu du corps des femmes pour produire des esclaves qui travailleront pour lui, qui nourriront la machine étatique. Le pouvoir de guérir, la connaissance des plantes lui est également retiré. La médecine moderne se met en route, uniquement aux mains des hommes dont Molière a dressé le portrait affligeant. Ce qui est enfermée au bordel, c’est la puissance des femmes au service du jouir des hommes.  Toutes les guerres du monde sont des guerres d’impuissants qui veulent le pouvoir, l’emprise sur l’autre, car ils ont été réduits à l’impuissance dès l’enfance. Un être puissant ne cherche pas à prendre le pouvoir sur l’autre, puisqu’il est installé dans sa puissance créatrice et sexuelle. Il se sent puissant, et n’a pas besoin d’écraser l’autre dans un rapport de pouvoir. C’est un surcroît de bonheur, la relation avec l’autre, et non un besoin pour assoir son pouvoir. La puissance est une sensation. Se sentir fort et puissant, sexuellement et physiquement, est essentiel pour l’humain. Cela va avec la sensation d’exister. Lorsque cette sensation intérieure a été anéantie de par son éducation, l’humain la cherchera à l’extérieur, dans le rapport de pouvoir et d’emprise afin de sentir sa force sur l’autre. La puissance intérieure, lorsqu’elle est préservée, est une force irradiante de vie, là où le pouvoir est une force verticale d’écrasement et de mort qui réduit à l’horizontale.

« Pourquoi alors nous rebat-on les oreilles avec la famille ? »

L’état est un corps composé des cellules familiales. Des cellules familiales maltraitantes préparent les enfants, dont les besoins essentiels ne sont pas respectés : besoin de tendresse, d’affection, d’amour, de respect, de reconnaissance, de valorisation, d’écoute, d’intérêt, de soutien au déploiement de leur désir, d’encadrement, de limites, de mouvement, d’informations etc….Ses enfants en manque de tout, conditionnés à obéir et à ne pas écouter leur corps et leur cœur, mais le mental d’adultes désaxés et déséquilibrés, sont de parfaites proies à la société de consommation que se nourrit de manque de tous ses « grands enfants manquants ». C’est bien en famille que sont dressés les futurs citoyens à obéir à toutes les injonctions, pulsions de leurs parents. Une fois lâchés dans la société ils obéiront et accepteront les codes sociaux qui ne sont qu’une réplique de ceux incorporés en famille. Enfermés dans des boites, des bureaux, comme ils ont été enfermés à l’école. Les femmes harcelées, comme elles l’ont été dans leur famille de différentes manières, conditionnées à se sentir faibles, à épouser puis servir, obéir à un mari et faire des enfants. Prisonniers d’une image de la sexualité donnée par le vécu en famille, et les représentations sociales. Enfermés dans des appartements, des clapiers à lapins, privés de mouvement. La liste est longue…Et surtout les citoyens paieront. Car l’état a besoin de citoyens qui payent la rente dont il se nourrit. L’état est bien sûr l’exact reflet de nos parents au niveau social. Il est un super prédateur. Conditionné à payer et à travailler dès son plus jeune âge, le citoyen n’a pratiquement aucune conscience que sa vie n’en est pas une. Esclave de ses parents qu’il doit entretenir jusqu’à leur mort ou la sienne, s’il meurt avant, (c’est inscrit dans le code civil cette obligation des enfants vis à vis des parents), esclave de l’état pour qui il travaille toute sa vie, il suffit de regarder le niveau confiscatoire des impôts en tous genres, directs et indirects, pour s’apercevoir que l’on reverse la plupart des revenus du travail au cours d’une vie, à l’état, les droits de succession venant couronner le tout. Il reste juste de quoi s’acheter les quelques fétiches proposés par la société de consommation, avec ses écrans, pour ne pas voir la réalité, l’énormité des abus. La famille n’est aucunement le lieu où l’amour rayonne et le respect domine. C’est le lieu où l’on apprend à obéir. Obéissant à nos parents, à nos maîtres d’école, nous obéiront ensuite à nos chefs, à nos maris, à toutes les structures de pouvoir dominés par les hommes, dans la société. La famille est la première structure de pouvoir, la première cellule où s’exerce et s’éprouve le pouvoir. Caserne, système totalitaire…les analogies sont nombreuses.

Qui a dit que le corps étatique composé d’un ensemble de cellules familiales était la meilleure organisation sociale???

« La société contre l’état » de Pierre Clastres, ethnologue, nous livre un éclairage étonnant de comment nous nous sommes trompés de chemin depuis fort longtemps.

Je précise que mon propos n’est aucunement de fustiger la gente masculine, les femmes sont tout autant responsables de leur esclavage. Les jalousies mères-filles sont un fléau.

 

 

 

 

Publié par

Catherine Baudry

Je suis poétesse et écrivaine.

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